Mon cher Quaesitus,
Soudain, une lueur vive illumine la nuit sombre et calme, puis une grande explosion. Un missile vient de détruire la maison des voisins. Le père de famille se lève d’un bond et s’approche angoissé de son épouse qui vient d’accoucher de leur premier-né. L’enfant et la mère n’ont rien, mais le quartier est en flammes. En quelques minutes, leurs maigres affaires sont prêtes et la famille prend le chemin de l’exil. Ils n’ont pas de voiture et dans ce chaos et ces cris, l’âne habitué aux travaux des champs fera l’affaire. Le père fait monter la mère et l’enfant. La famille, en hâte, se dirige vers la frontière … un voyage dangereux commence. Qu’en sera-t-il de leur avenir, surtout de celui de leur fils ?
Une histoire qui se répète depuis toujours
En écrivant ces lignes, je ne peux m’empêcher de penser avec émotion à ces multitudes de familles en Syrie, en Irak, mais aussi avant en Palestine, au Liban, en Libye ou au Rwanda, en Somalie, en ex-Yougoslavie et bien avant encore en Pologne, en Allemagne, en France et dans tous ces pays qui ont vécu deux guerres mondiales, le génocide contre les juifs, les handicapés, les tziganes, mais aussi contre les arméniens et avant encore les horreurs de la colonisation et de l’esclavage. Combien de fois ce type de scène s’est-il produit au cours de l’histoire ?
Quand les victimes de hier deviennent les agresseurs d’aujourd’hui … il arrive souvent que la roue tourne encore et encore et que les agresseurs d’aujourd’hui deviennent les victimes de demain. C’est le cycle désespérant de la force brutale.
Jésus, un pauvre petit immigré
Eh bien tu vois, mon cher Quaesitus, Jésus, à peine né, a aussi vécu ce réveil soudain durant la nuit et le départ en exil pour sauver sa vie.
« Voici, un ange du Seigneur apparut en songe à Joseph, et dit : Lève-toi, prends le petit enfant et sa mère, fuis en Egypte, et restes-y jusqu’à ce que je te parle ; car Hérode cherchera le petit enfant pour le faire périr. Joseph se leva, prit de nuit le petit enfant et sa mère, et se retira en Egypte. Il y resta jusqu’à la mort d’Hérode … » (Evangile de Matthieu 2.13b-15a – S21)
Il ne s’agit plus ici d’une belle histoire à l’eau de rose avec le bœuf et l’âne auprès de la mangeoire où repose le nouveau-né emmailloté avec amour. Une belle fable que l’on raconte ou joue au moment de Noël pour nos chères têtes blondes.
Ici c’est du concret, du dramatique, du sordide: Hérode, un roi cruel et grand bâtisseur a peur pour son trône. Des voyageurs venus de loin l’ont rencontré et ils lui ont dit candidement qu’ils venaient visiter un nouveau roi qui venait de naître. Le souverain se renseigne et apprend qu’il y a une ancienne prophétie qui annonce l’arrivée de ce roi et précise même l’endroit:
« Et toi, Bethléhem Ephrata, qui es petite parmi les villes de Juda, de toi sortira pour moi celui qui dominera sur Israël et dont l’origine remonte loin dans le passé, à l’éternité. C’est pourquoi il livrera son peuple jusqu’au moment où accouchera celle qui doit accoucher, et le reste de ses frères reviendra auprès des Israélites. Il se présentera et les conduira avec la force de l’Eternel, avec la majesté du nom de l’Eternel, son Dieu, et ils auront une habitation assurée, car sa grandeur sera reconnue jusqu’aux extrémités de la terre. C’est lui qui ramènera la paix. » (Michée 5.1-4 S21).
Cette prophétie, faite environ 7 siècles avant sa réalisation, était une grande espérance pour le peuple juif sous le joug de l’empire romain. Cette espérance entraînait régulièrement des séditions et des bains de sang. Jésus est né dans cette ambiance survoltée d’attente et d’espoirs déçus.
Tout prend plus de relief, n’est-ce pas Quaesitus ?
Ni une ni deux, ne voulant pas prendre de risques, Hérode envoie ses spadacins à Bethléem pour faire tuer tous les enfants de moins de deux ans.
Mais, dans les bras de sa mère, Marie, Jésus âgé de quelques semaines s’était déjà mis en chemin et a ainsi échappé à la mort.
Même dans sa patrie, sa vie a continué d’être menacée
Par la suite, alors qu’il débute son ministère, il doit fuir encore pour sauver sa vie pendant qu’il parle dans la synagogue de Capernaüm au milieu de gens qui le connaissent pourtant depuis tout enfant:
« À ces mots, dans la synagogue, tous devinrent furieux. Ils se levèrent, poussèrent Jésus hors de la ville, et le menèrent jusqu’à un escarpement de la colline où leur ville est construite, pour le précipiter en bas. Mais lui, passant au milieu d’eux, allait son chemin. » (Evangile de Luc 4.28-30 TOL)
Le voilà à nouveau en chemin pour fuir
Dans d’autres circonstances au Temple de Jérusalem cette fois, certains veulent s’emparer de lui. Il s’échappe encore.
Au temps marqué pourtant, une troupe viendra, il ne s’enfuira pas et quelques heures après il mourra sur une croix.
Toute la vie de Jésus a été sous la menace d’une mort violente. A plusieurs reprises, il a été traqué … mais lui a continué son chemin pour accomplir sa mission.
Mon cher Quaesitus,
Suivons-le sur les chemins qu’il a ainsi parcourus et voyons quelle est cette mission si importante pour lui. Peut-être nous concerne-t-elle plus que nous ne l’imaginons ?